Aha shake heartbreak

Kings of Leon

par Chtif le 19/03/2005

Note: 5.0    
Morceaux qui Tuent
King of the rodeo


Quand les jeunes gaillards de Kings of Leon débarquent en 2002, tout le monde rêve de les voir reprendre le flambeau du Allman Brothers Band. Trois frères et un cousin natifs de Nashville (Caleb, Matthew, Nathan et Jarred Followill) délivrant un sympathique album tendance country, "Youth and young manhood", il y a de quoi espérer une réincarnation, en effet.

Las, les quatre garçons ont été un peu trop hâtivement comparés à leurs illustres aînés de Creedence Clearwater Revival ou du maudit gang Allman, qu'ils avouent d'ailleurs ne jamais écouter. Le groupe enregistre à l'ancienne, certes, en analogique, et le chanteur, Caleb, débite un accent du Tennessee à trouer ses santiags, mais la similitude s'arrête là. Le groupe claironne son inculture musicale et réfute l'étiquette rétro sudiste qu'on leur a collée. Nos nouvelles majestés rock'n rolliennes préfèrent surfer paisiblement sur la désormais fameuse vague "revival garage" des groupes en "The". Avec, il est vrai, ce petit plus qui fait la différence, en l'occurrence des bacchantes de viking assurément photogéniques. Succès massif.

Leur deuxième album, "Aha shake heartbreak" tente bien évidemment d'enfoncer le clou. Autant le dire tout de suite, ils ont un peu tapé à côté. La faute à un incroyable sentiment de lassitude et d'épuisement qui se dégage au fil du disque, notamment au niveau des rythmiques, plus que mollassonnes, même quand elles sont censées s'emballer ("Pistols of fire"). Pourtant, la basse est gironde, parfois new wave et les compos honnêtes s'inscrivent à la croisée des Strokes et des Bees (sans cuivre toutefois), mais l'on s'enlise progressivement dans un inextricable bayou. C'est bien simple, quand la petite famille se met aux produits laitiers ("Milk"), on a carrément l'impression qu'elle va nous claquer entre les doigts. Non pas qu'on leur conseille de se remettre aux excitants, mais tout de même, avec 22 ans de moyenne d'âge, ça la fout mal. Juste un peu de café, peut-être...

Comble du je-m'en-foutisme, plusieurs morceaux sont tout bonnement bâclés, flingués sans sommation en pleine course ("Velvet snow", au hasard). Le procédé peut s'avérer efficace, créer le manque et la frustration, mais tombe ici complètement à plat en concluant prématurément une bonne moitié des morceaux.

Dommage, car l'inspiration ne fait globalement pas défaut : une tentative peu commune de complainte tyrolienne sur guitares hawaïennes ("Day old blues") côtoie un "Slow night, so long" insomniaque qui nous emmène voir poindre le jour dans l'ambiance tropicale d'un piano-bar. "King of the rodeo" promet bien des galipettes sur fond d'entrelacs guitare-basse à la Television (groupe de Tom Verlaine, responsable du légendaire "Marquee moon", album ayant influencé au bas mot 60% des formations actuelles). En fin d'album, "Rememo" distille quelques accords désertiques à souhait que ne renierait pas Mark Lanegan. Malheureusement, encore une fois, la balade s'achève trop vite, laissant un amer goût d'inachevé en bouche.

L'album déboule après deux ans de tournée qui les ont vus écumer le moindre festival européen. Les jeunes musiciens en sortent sur les genoux et cela s'entend. Les quelques bribes de chansons, composées à la va-vite pendant les balances et fourrées au fond du flight-case auraient sans doute méritées un meilleur approfondissement avant de se retrouver sur la galette. A trop vouloir battre le fer pendant qu'il est chaud, les Kings of Leon risquent bien de perdre leur couronne fragilement acquise.

Ah oui, dernière chose, qui a son importance. Selon les tabloïds, toujours à l'affût de croustillant, trois membres du groupe sur quatre ont perdu leur virginité après la sortie du premier album. Rien d'étonnant au prime abord, Jimmy Page lui-même n'était encore qu'innocence en débarquant pour sa première tournée US (il s'est bien rattrapé depuis, rassurez-vous). Mais du coup, Caleb Followill, encore tout émoustillé, multiplie les allusions coquinettes du genre "montre-moi tes petites tétons, allez s'il te plaît", et marmonne d'incompréhensibles babillages d'adolescent en pleine découverte sexuelle (est-ce pour cela qu'il a rasé son imposante moustache ... Trop sensible, la peau des groupies ... On ne sait pas encore le fin mot de l'histoire, mais une équipe bosse dessus.). Bref, les Kings of Leon découvrent de nouveaux horizons, et ça risque de virer hardcore pour le prochain opus si le groupe tombe sur Canal + un samedi soir de festival cet été...