Awcmon / Nowyoucmon

Lambchop

par Martin Simon le 13/04/2004

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
The lone official
Four pounds in two days


Deux ans après la sortie de "Is a woman", disque épuré et intimiste, Lambchop signe avec ce double album (ou plutôt cette double œuvre, car il s’agit bien d’un diptyque physiquement distinct) une musique douce, généreuse, fortement instrumentalisée et aux arrangements sagaces. Pas de doute, le collectif de Nashville puise bien ses influences au cœur de la culture country folk américaine ("About my lighter", "Each time i bring it up"), avec un penchant blues/soul de plus en plus marqué, avec notamment le blues de "Sang a dang dang" ou le sublime "Four pounds in two days", aux envolées de cordes proches du regretté Curtis Mayfield.

Certes, le collectif atypique (neuf musiciens, rien que ça ! et pas d’ego !) témoigne bien souvent d’un goût prononcé pour l’orchestration classique guitare/piano/cordes. Reste qu’il jongle à merveille avec un répertoire plutôt vaste. Ainsi, on pourra noter des accents jazz sur "Women help to create", voire bossa avec "The gusher", ou bien s’étonner du rock plus musclé de "Nothing adventurous please".

Quelque part entre Burt Bacharach, Lee Hazlewood et les Tindersticks, Lambchop s’approprie donc le style en conservant la forme. D’un raffinement presque acquis (outre l’étrange tubercule de la pochette…), c’est comme s’ils flirtaient tour à tour avec les références les plus distinguées de notre époque pour les unir, les fixer délicatement sur une même œuvre à deux facettes. Deux facettes qui se répondent de façon cohérente. Car le patchwork fonctionne - quoique parfois ennuyeux sur la longueur et respirant un air de déjà vu.

A l’écoute des premières notes de "Steeve Mc Queen", on pourrait presque penser au générique de Tom Sawyer. S’il est vrai que la musique de Lambchop a souvent des allures de bande originale - d’autant plus que, pour la première fois, le groupe livre quelques instrumentaux purs -, elle n’est cependant pas bonne qu’à jeter au générique d’une vieille série champêtre. La preuve avec "L’aurore", film muet de Murnau des années 20, pour lequel le groupe a récemment pris en charge l’illustration sonore dans son intégralité.

Pour de nombreux artistes, il semble plus facile de produire une musique sombre que gaie. Portée par le timbre suave et chaleureux de Kurt Wagner (rappelant par moments celui de Marvin Gaye), les compositions de Lambchop doivent être de talent. C’est en effet sur fond joyeux qu’il conte, avec ironie certaine, les vicissitudes de la vie, déceptions amoureuses ou énigmes existentielles, et le contraste n’en est que plus beau.