On ne savait pas que Lesley Duncan (1943-2010) avait fait partie des choristes triés sur le volet de « Dark side of the moon » (Pink Floyd, 1973) – et pourtant, comme beaucoup, on a longuement rêvé devant ce disque. On ne savait pas non plus que « Love song », une des plus belles chansons d’Elton John ( « Tumbleweed connection », 1971) n’était pas de lui. En résumé, on ne savait pas que la vie de Lesley Duncan ne se résumait pas à des notes de pochette.
Née à Stockton-on-Tees, en Angleterre, Lesley sort ses premiers singles dès 1963. Parallèlement à une production discographique régulière, elle développe une carrière bien remplie de musicienne de session qu’elle poursuivra jusqu’à son retrait de la scène musicale au début des années 80. Dusty Springfield, Elton John, Alan Parsons (la scie « If I could change your mind », 1978) auront souvent recours à ses services. On en serait presque étonnés. Lesley n’a pas une voix puissante (ce n’est pas elle qui en fait des caisses sur « The great gig in the sky » des Floyd), mais elle est extrêmement juste. Douce aussi, tout en étant subtilement assurée. Une voix qui se fond à merveille dans l’univers des autres, mais peut-être pas de taille à occuper la première place sous les projecteurs.
En tant qu’auteur et interprète, on doit bien avouer qu’une majorité de titres sur cette compilation couvrant la période 68-72 pour RCA et CBS (des singles, deux LP) laisse un peu indifférent ; la faute à des arrangements trop sages, du « middle of the road » précoce – Lesley serait considérée comme une des premières « singer songwriters » anglaises, comme Carole King outre-Atlantique. Les compositions restent jolies, alors que l’on pressent qu’elles pourraient aller vers des choses plus troubles, comme Judee Sill (« Chain of love »). On pense aux orchestrations superflues des chansons de Nick Drake sur « Bryter layter » (1970) – c’est à l’austérité de Drake que ferait penser une version plus sobre de « Sing children sing ». « Earth mother », avec ses guitares pedal steel spatiales, démontre avec évidence la connexion Floyd-Parsons. Globalement, les chansons au tempo plus enlevé ont du mal à groover (« Help me Jesus »). On préfère les moments comme « Love song », une petite douceur acoustique, intemporelle, vêtue légèrement de glockenspiel et de sifflotements. Pure comme « Everyday » de Buddy Holly.
Encore méconnue des exégètes, Lesley Duncan aura tracé sa route avec tenue dans le cirque pop, avant de s’en éloigner pour de bon. Une vie d’artiste discrète, mais loin d’être sans éclat.
LESLEY DUNCAN Chain of love (Live Tv BBC 1970)
LESLEY DUNCAN Love song (Audio seul 1968)
ELTON JOHN (feat. LESLEY DUNCAN) Love song (Audio seul, 1971)