| | | par Francois Branchon le 01/06/1999
| | |
| L'industrie musicale occidentale ne peut guère maintenir son pouvoir économique qu'en créant des modes artificielles pour les "consommateurs" (hier les Indiens, aujourd'hui les Celtes et les Cubains et demain : les Maures ?), en inventant des "micro ghettos" (je suis homo-j'écoute techno, je vis dans les quartiers nord-j'écoute du rap) ou en récupérant de fumeux concepts pour poseurs parisiens ("Chéri tu veux de la transe-machin-goa, du trip-hop sub-hardcore ou de la néo-country low-fi avec tes vitamines ?") ! Elle s'est dépêchée il y a quelques mois de sauter dans le train du "métissage culturel" et d'en faire un phénomène de marketing. Qui ne se souvient de ce "Mozart l'africain" de sinistre mémoire, terrifiant succès commercial mais disque honteux, manipulation de faiseur, paru voici trois ans ! Or, de tous temps, au gré des invasions, des migrations ou de l'esclavage (arabe ou celte sur notre continent, africaine en Amérique), les cultures se sont mêlées. L'homme comme sa culture, sa langue et à fortiori sa musique, évolue, bouge, avance, vit ; bref il s'enrichit en intégrant des éléments extérieurs. Pour ne se cantonner qu'au passé musical récent : la rencontre entre l'américain Ry Cooder et le malien Ali Farka Toure, la fusion raï-rock des lyonnais Carte de Séjour, le jazz de Jan Garbarek mêlant thèmes ancestraux de sa Norvège natale et oud tunisien, les pérégrinations d'un Pharoah Sanders dans la culture arabe, les carrefours Amérique-Afrique-Europe de l'Est d'un Julien Loureau ou d'un Akosh S... sont autant de démarches motivées par le désir de rencontre et dont la valeur réside dans l'échange. Le projet tombe forcément très vite à l'eau lorsque la tentative n'est irriguée d'aucune spiritualité. Ne s'arrêtant qu'à la forme, il ne produit que de l'apparence, du "joli", tragiquement vide d'émotion, et peut même côtoyer le pire, le fatras culturel "new age". Lancé à grand renfort de publicité, Mukta n'en est heureusement pas là. Mais, censé relier musique du monde (le sitar de l'Inde en l'occurrence) et musique ambient dénommée ici "world jazz", ce double Cd (le deuxième remixant le premier) laisse le triste goût de "cherche âme désespérément" ! Et dans ses pires moments, on croit entendre la bande son d'une pub pour produits laitiers... |
|
|