Injury time

Peter Astor

par Emmanuel Durocher le 01/10/2006

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
Ghost sister
Street of lights
She took the TV


Après les aventures The Loft et Weather prophets, Peter Astor a publié aux débuts des années 90 quatre albums avec une rapidité et une régularité rares : "Submarine" en 1990 et "Zoo" en 1991 sont sortis chez Creation alors que "Paradise" en 1992 (sous le nom de Peter Astor and the Holy Road) et "God and other stories" en 1993 ont trouvé refuge en France sur le label Danceteria.

Le songwriter a choisi lui-même les morceaux de "Injury time", compilation de ses travaux en solo avec une part belle à la période Creation (avec certaines chansons qui auraient été écrites bien avant). Il ne faut pas bouder son plaisir et se laisser porter par ces compositions simples et belles entre pop, folk et blues ; on est entraîné sur le parcours intimiste et introspectif de Peter Astor avec dissection des sentiments et des angoisses mais une grande ouverture de cœur ; la musique, qui privilégie les guitares claires et utilise la batterie avec discrétion, sublime l'écriture dont le fil conducteur reste la mélancolie et la cassure.

Ce qui est paradoxal, c'est de voir ces chansons assez intemporelles qui restent en même temps un pur produit de l'époque car elles rappellent de nombreux artistes de ce début de décennie 90 : la mélodie faussement douce de "Miss A" évoque Lloyd Cole en solitaire, les sonorités byrdsiennes sur "I wish i was somewhere else" se perdent dans des brouillards déjà rencontrés avec Guy Chadwick et The House of Love, la route du sud et le timbre de crooner de "Donnaly" et "Chevron" ont été empruntés par Chris Isaak et les refrains presque adolescents de "She took the TV" semblent avoir été écrits pour une compilation du défunt label de Bristol Sarah Records, on peut encore citer Matt Johnson de The The ou l'homme-lapin Ian McCulloch... mais chacun pourra trouver son bonheur dans cette très belle collection de vingt morceaux. On regrettera juste un ou deux titres un peu faiblards comme "Heart shaped swimming pool" et son folk plaintif.

Par la suite, un peu désenchanté, le britannique jettera l'éponge suite aux échecs commerciaux (malgré un succès critique) de ses albums et quelques déconvenues (non-distribution à l'étranger de certains disques, faillite de Danceteria…), le tout aidé par une certaine misanthropie et un ego au-dessus de la moyenne, il se dirigera vers des projets électroniques obscurs comme Ellis Island Sound ou Wisdom of Harry. Douze ans après, Astor a-t-il digéré ce manque de reconnaissance, pas sûr car le titre de la compilation, les "arrêts de jeux" ou le "temps additionnel" d'un match, laisse planer un sérieux doute.