I might be wrong (Live recordings)

Radiohead

par Filipe Francisco Carreira le 07/12/2001

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
I might be wrong
Like spinning plates
True love waits


En cette fin d'année 2001, que dire sur Radiohead qui n'ait déjà été dit ? Il y a un an, le groupe mettait fin à un silence interminable - trois ans, une éternité ! - et ce, avec un disque étrange et insaisissable. Pourtant "Kid A" réalisait l'incroyable et mettait tout le monde d'accord, tout le monde minable. Public et presse, Europe, Etats-Unis : tous au tapis. Quelques mois plus tard, "Amnesiac" confirmait l'orientation et, tel un frère siamois, héritait des traits les plus caractéristiques de son prédécesseur : le sens de l'aventure, le goût de l'inachevé. Une telle constance, forcément, ça devenait ennuyeux. Aussi, des voix commencèrent ici et là à s'élever contre le groupe : on leur reprochait une soi-disant dérive rock progressif. Le groupe a de toute évidence fait progresser le rock. Certes, l'absence de mélodie aisément identifiable, le recours à une écriture chaotique et des pochettes incompréhensibles laissaient supposer une approche un rien conceptuelle et faisaient, à terme, craindre le pire. Faut-il pour autant l'associer à un mouvement qui, le plus souvent, était le fait de techniciens chevronnés en quête de respectabilité ? C'est dans ce contexte - à point nommé - que déboule "I might be wrong / Live recordings", leur premier album live. Huit morceaux enregistrés entre Oxford, Berlin, Oslo et Vaison la Romaine, tous issus de "Kid A" et "Amnesiac" à l'exception du dernier, "True love waits", durée totale quarante minutes, voilà pour les données statistiques. Pour le reste, Radiohead coupe court aux interrogations qui émaillent le début de cette chronique. Et force le mea culpa "je m'excuse, j'pensais pas ce que je disais" de ceux qui voudraient ne jamais avoir douté d'eux. Où est-il, le groupe de rock progressif pour adultes et redondants, on n'entend ici que des chansons paranoïaques, tendues à l'extrême, comme au bord de la rupture, "The national anthem", "I might be wrong", sur lesquelles Thom Yorke, funambule insolent, défie le vide de ses coups de folie / coups de génie, "Idiotheque". Lorsqu'il s'accorde enfin quelques moments de répit, "Like spinning plates", Radiohead s'expose encore davantage au danger, tant il peine à contrôler une énergie souterraine, volcanique, prête à jaillir par torrents ou à nous attirer dans un fond trouble et marécageux, "Everything in its right place". En clôture, "True love waits" renoue avec le dénuement et la fragilité de "Fake plastic trees" ou "High and dry" de "The Bends" en 1995 et ferait presque pleurer un Jean-Marie Meissier... Jean-Marie Meissier pleurant sur du Radiohead ? Voilà un monde qui serait beau !