Gallantry's favorite son

Scott Matthew

par Jérôme Florio le 08/07/2011

Note: 8.5    

Avec un titre tellement vieux jeu, on se doute bien que le disque de Scott Matthew ne concourt pas dans la catégorie perdreau de l'année ; pour ce mélange de désuétude revendiquée et d'auto-dépréciation amusée, on pense à Morrissey ("And sorrow’s native son / He will not smile for anyone", gémissait ce dernier dans "Pretty girls make graves" du temps des Smiths). Avant de se lancer en solo, Scott a d'ailleurs collaboré avec Spencer Cobrin, ex-batteur du Moz, au sein du groupe Elva Snow.

Jouant très ostensiblement le hors-mode, "Gallantry’s favorite son" est une oeuvre de solitaire où l'élégance est le mot d'ordre. Douillette même dans la douleur. La note est tenue de bout en bout, à commencer par "Black bird" qui pose les éléments du décor : une belle voix voilée, soutenue par des cordes et des claviers placés avec une sensibilité et une économie qui en décuplent les effets. Le chant de Scott Matthew prend sa source auprès de Scott Walker et David Bowie - infiniment plus supportable que les jérémiades de Antony and the Johnsons, "Gallantry’s favorite son" pourrait faire un bel attelage avec le récent disque de Prince of Assyria.

Rien ne pèse : "Sinking" est un délicieux poison, un philtre d'amour miraculeusement équilibré, qui fait siffloter avec insouciance les coeurs amoureux ("Felicity") ; accords ouverts, envolée mélancolique happy sad et des choeurs qui s’imposent peu à peu (on pense à John Cunningham) sur “The wonder of falling in love”, avec aussi un pont d'une rare délicatesse. L'inspiration est parfois assez lyrique ("Duet"), jusqu'au chant qui se fait trop maniéré sur "Buried alive", avec encore des choeurs qui semblent se faire entendre depuis l’autre côté de la vie. Il est souvent question de l'au-delà ("Devil's only child", "Sweet kiss in the afterlife"), à moins que Scott Matthew ne dépeigne un enfer un tantinet masochiste : on prendra sans hésiter un aller simple pour "No place called hell", qui chaloupe presque comme le Harry Nilsson de "Coconut" (1971). "Gallantry's favorite son", ou la politesse - assez british -  de donner à entendre avec légèreté des émotions graves.




SCOTT MATTHEW Sinking (live Berlin 2011)