O'Boys - Tome 1 : Le sang du Mississippi

Steve Cuzor et Philippe Thirault

Dessin : Steve Cuzor
Scénario : Philippe Thirault
par Francois Branchon le 07/04/2009

Note: 9.0    

Libre adaptation de "Huckleberry Finn", le bouquin de Mark Twain, "O' boys" met en scène, sur les bords du Mississippi au début des années trente, le jeune Huck Finn, gavroche blanc miséreux, vivant sous la coupe d'un ogre de père, alcoolo, violent et trafiquant minable, et Charly Williams, jeune adulte noir, qui paye sa couleur à chaque coin de rue, dans cette Amérique du sud profond encore bien loin d'attendre son Obama... Résolus tous deux à fuir leur sort et à partir "tailler la route" ("brûler le dur"), ce sera le fleuve, puis les trains, et la vie de "hobo", vers l'Ouest et le Nord.

Si la misère et les humiliations unissent socialement Finn et Williams, c'est le blues qui les réunit et donnera un but à leur fuite. Un blues que Huck découvre en clandestin, planqué derrière les carreaux du "Do Drop Inn", le juke-joint local, ces barraques en planches "bars à nègres", où le soir, piano, chants, filles faciles et alcool de contrebande font monter la température de quelques degrés. Williams y gratte sur sa vieille guitare désossée ce "Me and the devil blues" de Robert Johnson qui fascine tant Huck...

Prévue sur trois volumes, ce tome 1 situe l'histoire et se termine sur le début du voyage. A la manière des grandes BD western des années 70 (période "Jim Cutlass" de Jean Giraud), "O' boys" est une réussite. Le scénario est parfaitement rythmé, cinématographique à souhait (on imagine les frères Cohen s'emparant de l'affaire), avec son lot de péripéties et de rebondissements. Les dialogues ont leur dose d'humour (les frasques du père Finn, les embrouilles au juke-joint, la vie quotidienne chez le notable du coin, éleveur industriel de poisson-chats chez qui Huck est "placé", le shériff berné...), mais surtout, les auteurs laissent transparaitre un amour du blues quasiment à chaque page, et leur empathie profonde avec ceux qui le portent.

Robert Johnson terminait "Me and the devil blues" par "Down by the highway side, So my old evil spirit, Can catch a Greyhound bus and ride" (Au bord de la grand route, mon vieil esprit damné peut attraper un bus Greyhound et filer)... Huck et Williams ont choisi le train et la vie de hobo. Vivement le tome 2...