Enemy mine

Swan Lake

par Jérôme Florio le 06/05/2009

Note: 6.5    

La musique de Swan Lake n'a pas vraiment la quiétude d'un lac (des cygnes) : cérébrale et accidentée, elle est le produit du jus de trois cerveaux qui officient dans des groupes différents. Dan Bejar (Destroyer), Spencer Krug (Wolf Parade) et Carey Mercer (Frog Eyes) se côtoient depuis longtemps et officialisent leurs liaisons au sein de Swan Lake depuis " Beast Moans" (2007).

Selon sa sensibilité, on peut trouver que la musique du trio est une exigeante pop futuriste (les musiciens font partie de la scène canadienne), ou bien une ennuyeuse réminiscence prog-rock (King Crimson) voire de krautock teuton (Amon Düül). Cette tendance, déjà décelable chez Destroyer de Dan Bejar, se traduit par des reliefs tordus et baroques, où l'objectif semble être de refléter les soubresauts d'un esprit perturbé. On penche alors vers des ambiances conceptuelles limite casse-noisettes (Tchaïkovski, again !), qui peuvent rappeller les méandres de "Outside", la tentative trop intello de David Bowie. "Peace" et "Warlock psychologist", déjà retorses, souffrent de l'interprétation boursouflée et théâtrale de Carey Mercer. Dans un mouvement un peu schizophrène, les accalmies sont assurées par la voix nasillarde de Bejar : le mid-tempo "Heartswarm" assez classique, avec piano et tapis rythmique de guitare acoustique ; "Spider" est plus directe, sans convaincre totalement. "A hand at dusk" déploie longuement sa ligne de piano et ses effets électroniques, avec une voix filasse à la Robert Wyatt. C'est encore "Paper lace" qui séduit le plus, avec un léger décalage dans l'utilisation des instruments (guitare acoustique, claviers) qui arrive à créer un charme assez indéfinissable, presque hispanisant, d'une apparente simplicité.

C'est justement cette absence de simplicité que l'on regrette, un défaut peut-être inhérent à ce genre de disque collaboratif. Bejar, Krug et Mercer sont tous trois doués et dotés de fortes personnalités : sur "Enemy mine" c'est comme si ils cherchaient à justifier de leur collaboration en complexifiant à outrance. L'ennemi vient de l'intérieur...




SWAN LAKE Paper Lace (audio)