A whisper and a sigh

Syd Matters

par Martin Simon le 25/04/2004

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
Black and white eyes
Stone man


Pas évident, au premier coup d'oeil, de deviner qui se cache derrière ce visuel élégant au lettrage délibérément crasseux. Méprise passée, on découvre que Syd Matters n'est pas bédéphile averti ni anglais, mais Jonathan Morali, jeune étudiant français en histoire, remarqué par la presse puis lauréat du concours Cqfd des Inrockuptibles. "A whisper and a sigh" est son premier album, incroyablement mature, genèse d'un univers léger et coloré.

Pourquoi donc un nom si anglicisant ? Peut-être parce que Jonathan chante en anglais. Peut-être aussi parce qu'il cherche à s'inscrire dans la lignée fertile des maîtres du songwriting, de Nick Drake à Elliot Smith, se nourrissant sans cesse d'influences anglo-saxonnes. Aux abords d'une pop hybride et mélancolique, on côtoie ainsi la désinvolture folk de Beck ("Morpheus"), l'ivresse propre aux arpèges de Grandaddy ("Battle of Olympus"), la déstructuration méthodique de Radiohead, ou encore, comble de l'honneur, la langueur des nappes de Robert Wyatt.

Mais la créativité mélodique du petit cadet ne s'achève pas ici. Car Syd Matters parfume ses inspirations pop seventies de touches electro brillamment distillées. Boites à rythme, effets en tous genres, claviers synthétiques proches de Air ("Dead machine"), filtres guitares façon The Strokes ("Stone man") et titres peu équivoques ("Dead machine", "Automatic") : le mariage offre une dimension sonique admirable et peu commune, conférant une réelle identité au disque.

Une identité, soutenue par des textes aux images séduisantes. Tantôt mélancolique ou faussement joyeux, Syd Matters enveloppe ses compositions d'un romantisme moderne, suffisamment discerné et musicalement riche pour ne pas sombrer dans la niaiserie. C'est vrai, on s'ennuie par moments. Mais la spontanéité de cet album, aux envolées surprenantes et vaporeuses, est telle qu'on pourra passer outre quelques inégalités.

"A whisper and a sigh" fait donc partie des albums qui ont une âme. Intuitivement toujours, profondément de son temps et nostalgique à la fois, Syd Matters nous propose une musique empruntée mais personnelle, à la géométrie disparate mais unie dans l'esprit. Il peut sans crainte rejoindre la famille.