The Datsuns

The Datsuns

par Jérôme Florio le 13/03/2003

Note: 8.0    

Après la vague intellectuelle du "post-rock" il y a quelques années, le récent disque des néo-zélandais Datsuns confirme la tendance actuelle : fuite des cerveaux !

Datons leur "préhisto-rock" au Carbone 14 : véritable anachronisme musical, ce disque aurait pu sortir il y a trente ans. Cryogénisés en 1972, décongelés en 2002, la famille Datsun (Joe, Dolf, Phil et Matt) semble clonée à partir d'un poil de moustache de Tony Iommi (guitariste de Black Sabbath). Ils apportent un cinglant démenti à la théorie de l'évolution. Au début n'était point le Verbe : au début était le "Riff de Guitare". Tout est dans le registre du rock mal élevé, pas sophistiqué, qui a trois mots à son vocabulaire : "motherfucker", "hell", et on te fait une chanson intitulée "Motherfucker from hell" ("enculé de l'enfer"). Jouissif, et ça s'écoute très fort. Pour Noël, les Datsuns ont eu la panoplie des groupes de (hard) rock fin sixties début seventies, rien ne manque : matos d'époque, riffs bien gras, l'orgue pas entendu depuis "Machine head" de Deep Purple ("At your touch", "In love"), et bien sûr les tignasses qui vont avec. On décèle aussi des gènes des Troggs dans ces morceaux à un accord méchamment martelé ("Harmonic generator").

Ces références, qui auraient été ringardes il y a peu, sont aujourd'hui très tendance : un hommage à Black Sabbath est sorti récemment, il fait bon ressortir ses vieux t-shirts de groupes de hard... On pourrait simplement dépoussiérer le vinyle de “Made in Japan”, ou de “Paranoid”, et se dispenser de l'achat du disque. Mais qui s'est déchaîné sur "Whole lotta love" ou "Highway to hell" en mimant à genoux des solos de guitare invisible ne pourra pas rester insensible à tant de sauvagerie bon enfant. Peut-être les Datsuns font-ils groupe de synthèse, dégraissé des éléments les plus malades et du culte du guitar-hero, avec un son nickel d'aujourd'hui, une durée de vie moindre. Et qui de plus inoffensif, avec leurs confrères Hives, Vines etc... ? Quelle est la part de calcul des maisons de disques qui veulent toutes "leur" groupe de rock'n roll ? On peut s'attendre à bientôt voir arriver toute une flopée de sous-produits avariés. Mais tant que c'est frais, on sourit d'une joie bête, on on met le volume à 10, et on tape du pied !