Judges, juries and horsemen

The Weather Prophets

par Jérôme Florio le 20/01/2005

Note: 9.0    

Peter Astor est un de ces dandys qui traversent la pop anglaise, amateur d'écriture racée, qui n'a jamais fait qu'effleurer une plus large reconnaissance que ses chansons méritent pourtant. Il s'en est approché de près quand il travaillait ses influences rock au sein des Weather Prophets, formés en 1986 : mais Astor semble se promener avec un nuage noir au-dessus de la tête.

"Judges, juries and horsemen" (un titre que même Morrissey ne pourrait pas se permettre !), tranchait avec la ligne claire de rigueur en 1988 – par exemple celle du chamallow Lloyd Cole & The Commotions, avec lequel Peter Astor partage cette diction traînante dûe à une mutuelle fascination pour Lou Reed. L'influence de la musique sombre et lancinante du Velvet Underground est plus apparente chez Astor, qui tente aussi d'approcher les héroïques constructions de guitares de Television : la pop mélodique de très bonne facture des Weather Prophets est attirée sous des climats plus épiques, qui font durer des chansons comme les nuages d'un ciel de traîne ("Hollow heart").

Cela n'empêche pas le piano, le saxophone ("Always the light"), et surtout ces guitares cristallines "jingle-jangle" de tisser leurs fines mailles : la sensibilité de "Thursday soon" s'approche de Morrissey dans sa vision mélancolique et romantique de la vie ordinaire, les guitares gentiment funky de "Well done Sonny" et "Ostrich bed" retrouvent le peps du label écossais Postcard (clin d'œil à "Ostrich churchyard", le premier album d'Orange Juice ?). Mais quand une brise fraîche se lève, un rien vicieuse et chargée d'électricité statique, elle raidit immédiatement l'atmosphère ("Poison mind", "You bring the miracles", "Sleeping when the sun comes up" qui évoque le meilleur de House Of Love, des voisins de label). "Stepping lightly on the ancient path" est un morceau de bravoure hypnotique et tendu, sur laquelle Peter Astor divague un parlé-chanté habité.

Après les Weather Prophets, dont ce disque marque la fin, Astor gravera le languide "Submarine" puis s'en ira oublier un peu le rock avec ses projets électro The Wisdom of Harry et The Ellis Island Sound. Plus de quinze ans après, il n'y a pas prescription, il est toujours temps de faire une place au soleil à "Judges, juries and horsemen".

Pour info : Peter Astor publie en ce moment un disque en solo, "Hal eggs", édité à 500 exemplaires chez Static Caravan (site en lien ci-contre)