Tiny Tim fut une
typique erreur d'aiguillage. Joueur expérimenté d'ukulélé, doté
d'une voix au falsetto profond, amoureux des musiques et chansons des
années cinquante de la grande variété américaine, luxueuse et
léchée, jusqu'au répertoire de Tin Pan Alley, Herbert Buckingham
Khaury ne rêvait que d'une carrière de crooner. Mais en 1966, tout
étant possible dans l'explosion musicale générale, le marketing de
Warner Bros se régale de ce physique "difficile" et d'une
apparence hors-normes - un géant avec un instrument minuscule -
l'affuble de l'adjectif tiny (minuscule) et le lance comme un
phénomène de foire, poussant son falsetto dans l'étrange sur des
chansons décalées.
Avec le recul on peut penser que Warner
précédait là la folie future des cinglés de chez Rhino qui feront
pire en 1980, mais Tiny Tim était-il vraiment complice de ce jeu de
l'outrage décadent ou l'acceptait-il comme une carrière par
défaut... C'est parfois gênant.
Le succès fut quelque temps au rendez-vous puisque
sa maison de disques produira cinq albums (tout de même !) et une
tripotée de singles que cette compilation rassemble pour la première
fois. Et au-delà des gags - l'emblématique "Tip-toe thru'
the tulips with me" - l'homme révèle des morceaux de grande
tenue, mais hélas passés inaperçus, comme ce "The other side", à
s'écouter entre un Cramps et un Electric Prunes... (les deux titres à voir ci-dessous)
TINY TIM Tip-toe thru' the tulips with me (Live Us TV 1967)