Comfort for the traveler

Utah Carol

par Vincent Théval le 01/05/2002

Note: 7.0    
Morceaux qui Tuent
Airplanes
Silver space rocket
Promised land


Vivre et étudier sur le campus d'une université américaine ne peut consister seulement à courir à perdre haleine pour fuir un adolescent boutonneux déguisé en fantôme, obstinément décidé à vous planter un couteau entre les omoplates. Il ne peut s'agir non plus de tester toutes les positions du Kamasutra avec un animal de compagnie, sous le regard bienveillant d'un poster de Britney Spears. Vivre et étudier sur le campus d'une université américaine, c'est découvrir REM et "Radio Free Europe" en 1983 sur une college radio d'Athens (Georgie), rêver dans sa chambre en écoutant le "Fake book" de Yo La Tengo en 1990, rester fidèle à Jonathan Richman en 2002. Vivre et étudier sur le campus d'une université américaine ne nécessite même pas d'être étudiant ou de résider sur le territoire américain, Dieu merci. Porter un T-shirt Weezer au bureau, relire Salinger dans le métro, accueillir Utah Carol à bras ouverts, tout cela peut faire l'affaire. On ne sait pas grand-chose de Grant Birkenbeuel et Jinja Davis sinon qu'ils viennent d'entrer avec une déconcertante facilité dans le cercle de nos amis et que "Comfort for the traveler" est désormais frappé d'une interdiction de séjour dans son boîtier. Utah Carol sillonne les routes d'une Amérique déjà rêvée par d'autres, les Byrds, Yo La Tengo, les Papas Fritas ou Air Miami. Soit une pop bucolique, légère jusqu'à l'évanescence, d'une inventivité remarquable, qui fait feu de tout bois mais aussi de toutes cordes : nos nouveaux amis ont beaucoup de guitares et, mieux encore, n'hésitent pas à s'en servir, avec goût et parcimonie. Survolant un orgue et une rythmique précise, quelques arpèges de guitare traversent le forcément aérien "Airplanes" ouvrant l'album dans une atmosphère enfantine et rêveuse, dont il ne se départira pas, louchant tantôt vers des fulgurances pop tendues et mélancoliques ("Silver space rocket" digne d'un "Radio Free Europe" interprété par une Kim Deal sevrée), des curiosités plus ou moins aventureuses ("Nellie", petite perle brodée sur des motifs vaguement orientaux) ou des ambiances plus profondément américaines : la pedal-steel guitar de "When we're apart" et du très rythmé "Promised land", chef d'œuvre de subtilité mélodique, chanté harmonieusement par Monsieur et Madame, dont il faut souligner que les voix se marient à merveille.