Chroniques Concerts

Art Brut et Brian Jonestown Massacre – Paris La Cigale 26 juin 2006

Posté par : Emmanuel Durocher le 30/06/2006

L'inconvénient des festivals à la Cigale (ici organisé par une marque de gomme à mâcher avec distribution à tous les étages), c'est qu'il faut se pointer pile à l'heure indiquée sur le billet ; évidemment avec une heure de retard, j'ai raté la prestation de Sébastien Martel et suis arrivé tout juste pour Art Brut.

Les britanniques ouvrent les hostilités avec l'inusable "Formed a band" avec comme balise le chanteur Eddie Argos en costume dépenaillé dont la veste et la cravate ne survivent pas aux deux premiers titres. Le groupe continue avec des chansons extraites pour la plupart de leur album "Bang bang rock & roll" et malgré quelques titres un peu brouillons, l'énergie qui se dégagent de "Rusted guns of Milan", "My little brother", "Emily Kane" ou "Good weekend" est indéniable. La grosse caisse architendue de Mickey B rythme les morceaux, les deux guitaristes Chris Chinchilla et Ian Catskilkin s'en donnent à cœur joie dans un mélange de pop, punk et ska, chamaillant gentiment et adoptant toutes les postures des stars des six-cordes des quarante dernières années, la bassiste Freddie Feedback la joue D'arcy Wrest tranquillement dans son coin. Quant à Argos, il fanfaronne dans ce joyeux foutoir; à la manière de Mark E Smith, il annone plus qu'il ne chante et bouge dans tous les sens alternant entre mouvements saccadés mais distingués à la Robert Foster et grandes ondulations avec ouverture de chemise comme Morrissey les bourrelets en plus. Le public s'amuse, pogote, on monte sur la scène, on saute sur les copains…

Puis c'est le tour du Brian Jonestown Massacre, très attendu pour son premier (ou deuxième ?) concert à Paris et au statut déjà culte depuis la sortie au printemps 2005 du docurock "Dig" sur les parcours croisés puis divergents du groupe et des Dandy Warhols. Le visage de Brian Jones apparaît sur la batterie mais les américains affichent un style un peu grunge ; Anton Newcombe, leader charismatique chante torse nu sur le côté gauche de la scène, il n'interviendra qu'assez peu pendant les longues pauses entre les titres pour ne raconter que des banalités pas toujours cohérentes. De toute manière, l'essentiel se trouve dans la musique, le groupe interprète des morceaux comme "Sailor", "Servo", "Swallowtail", "Hide and seek", "Nevertheless", "That girl suicide", "Nailing honey to the bee" aux mélodies imparables, accompagnés par la voix suave de Newcombe qui se terminent souvent dans des longs chaos psyché-shoegaze. Le public est captivé mais ça s'agite moins dans les premiers rangs, pas de pogo, ni de stage-diving, la plupart des gens ont sûrement encore en mémoire la terrifiante scène à la fin de "Dig" dans laquelle un méchant coup de botte dans la tronche d'un spectateur énervé est donné par un Anton Newcombe en pleine déchéance. Pour terminer, pas de rappel et carton rouge à la Cigale qui n'a pas permis au Brian Jonestown Massacre de revenir sur scène malgré l'insistance du public pendant une quinzaine de minutes, une honte !


Ron Sexsmith - Paris Nouveau Casino 14 juin 2006

Posté par : Jérôme Florio le 16/06/2006

Concert impeccable du canadien, qui rendait une nouvelle fois visite au public parisien après sa venue en septembre 2004 (déjà dans la salle de la rue Oberkampf, hier soir davantage remplie et d’une chaleur étouffante). La formule en duo permettait d’apprécier au mieux les chansons : Sexsmith à la guitare acoustique ou au piano (deux titres, dont "Tomorrow in her eyes"), et son acolyte à la guitare (et mandoline) électrique, avec des harmonies vocales toujours justes et en place. Le set était bien équilibré, de l’americana moelleuse des récents "Time being" (2006) et "Retriever" (2004), aux titres plus anciens emblématiques du bonhomme et appréciés des fans ("Secret heart", "River bed", "Gold in them hills"…). Entier et franc du collier dans ses interprétations, Ron Sexsmith était en forme vocalement, et il a montré sur une paire de titres joués en solo ("For the soldier" par exemple) sa maîtrise d’un finger-picking à la fois très rythmé et mélodique. En rappel, une reprise un peu tendre de Leonard Cohen ("Hey, that’s no way to say goodbye") et plus tôt dans le set, une épatante version d’un titre de Sam Cooke. Niveau d’écriture constant, qualité de l’interprétation, souci de la mélodie : Ron Sexsmith est un gars sur lequel on peut compter.


The BellRays - Paris La Maroquinerie 06 juin 2006

Posté par : Jérôme Florio le 09/06/2006

Les BellRays pouvaient bien sabrer le champagne en public, après plus d'une heure trente de concert endiablé et pied au plancher, dans lequel ils se sont donnés sans compter. Et pour cause : c'était le dernier show de leur tournée. Le groupe a terminé fier d'avoir livré une performance énorme, et le public heureux, complètement rincé et les oreilles en bouillie. Emmenés par la superbe Lisa Kekaula (quelle coiffure afro seventies !), les BellRays ont démarré plutôt tranquille, explorant les titres plus calmes de leur dernier "Have a little faith". La foi, ils l'ont, pas de doute : Kekaula se sort avec les honneurs de son rôle de diva soul (descente dans le public) avec l'abattage d'un Rob Tyner (chanteur du MC5, même coupe afro, même ville d'origine Detroit...). Derrière, Tony Fate (guitariste bien bâti), Bob Vennum (bassiste faux jumeau de Wayne's World) et Craig Waters (batteur fou au look Véronique et Davina, chemise entrouverte sur paillasson pectoral) bastonnent comme des malades, à se faire péter la rate. Kekaula, qui tourne sur scène comme une lionne en cage, domine ce barouf avec la classe d'une Tina Turner surplombant le "mur du son" de Phil Spector. A force d'invite au public à se lâcher, la sauce a pris au-delà de leurs espérances : le long et premier rappel est survenu après que la foule scande "Bell-Rays ! Bell-Rays", qui ont définitivement emporté les suffrages avec la reprise des "Cornichons" de Nino Ferrer. Tout le monde a repris en choeur, le sourire de Lisa faisait plaisir à voir et Nino, de là-haut, approuvait sûrement, lui qui "voulait être Noir". "Highway to hell" d'AC/DC concluait le set dans la communion générale du groupe, des roadies invités sur scène et du public. Pour finir, serrage de pognes (et baise-main pour Lisa Kekaula) et tapes dans le dos, un vrai bon moment rock'n roll, fun et gavé d'énergie positive.

Photo © Steffen Paulus




Shearwater - Paris Café de la Danse 31 Mai 2006

Posté par : Jérôme Florio le 01/06/2006

Jonathan Meiburg était à Paris mardi soir (un mois à peine après être venu en tant que membre d'Okkervil River au Batofar) pour présenter le nouveau et très beau disque de Shearwater "Palo Santo".

Un court set (en première partie d'Emily Loizeau) en solo, qui a montré que le jeune homme ose désormais jouer pleinement de sa voix, la poussant dans tous les registres – du murmure serein ("Palo Santo") à la harangue ("Seventy-four, seventy-five), ce qui est assez casse-gueule, joué à froid. Meiburg passait du piano à la guitare, puis au banjo ("Whipping boy"). L'exécution n'était pas parfaite, et le garçon manque peut-être un peu d'épaisseur, mais il cherche quelque chose et "Palo Santo" est une belle étape sur son parcours.

Un petit coup de gueule : pas gênés, les gens arrivés en premier avaient pris toute la place en s'asseyant dans la fosse étroite devant la scène, obligeant les autres (dont moi) à s'excentrer complètement ou se replier au bar en hauteur. Pas sympa. A tous ceux-là, je souhaite de se réveiller le lendemain avec le fondement farci d'hémorroïdes !

Setlist :
La Dame et la Licorne / Whipping boy / Palo Santo / Seventy-four, seventy-five / Hail, Mary

(photo © kathrynyu.com)