Chroniques Films

Vengeance de Johnny To (avec Johnny Hallyday, Sylvie Testud)

Posté par : Francois Branchon le 31/05/2009

Le fil rouge de ce film est sonore, on y tire en permanence, dans tous les sens, sans qu'on comprenne parfois qui tire sur qui.

Bien sûr Johnny Hallyday tire aussi, vous n'imaginez pas qu'il allait s'en priver ! Après sa rencontre avec un trio de tueurs à gages croisés par hasard à l'hôtel (scénario capillotracté), et une fois les avoir convaincu que lui aussi il sait tirer. Ah que quand même ! Et même qu'il sait remonter une arme en une fraction de secondes, une serviette nouée autour des yeux ! Ah que Johnny ! Johnny passe évidemment à travers les balles, banal, saute de trois étages sans une égratignure, normal, tout juste s'il s'ébroue comme un canard, et comme un canard (sans tête) repart. Idole des jeunes. Quand même une fois y'a malaise, une salope de balle vient se ficher dans sa poitrine. Mais opéré à vif par ses potes avec un cutter à moquette (séquence mâchoires à Johnny crispées, et sang à Johnny partout), il gambade un quart d'heure après et reprend des sushis. Ah que héroïque ! A la fin, dans un Macao crépusculaire et désert, il gueule Optique 2000 (en fait il gueule "George Fung", mais on entend Optique 2000), et ça, juste avant de descendre à lui tout seul la cinquantaine de gardes du corps sur-armés du chef de la mafia locale, genre Clint Eastwood à la fin de "Pale rider", mais en plus... comment dire... en plus Johnny, voilà. Ah que Johnny ! Son texte se résume au minimum syndical ("i want revenge" et "i want to kill the guy"), le reste du temps, il se contente de déposer son regard vide et alourdi sur ses collègues acteurs, convaincu d'un jeu profond.

Que dire de Johnny To, sur-vendu ces jours-ci comme un maître. Son film se voulait hommage à Melville (le personnage d'Hallyday se nomme Costello, comme Delon dans "Le Samouraï"), mais il ne décolle jamais, sans souffle ni rythme malgré les déchaînements. Les scènes de mitraillages (légions) sont à mille lieux de l'esthétisme d'un John Woo ou d'un Ang Lee ou de l'intensité d'un Takeshi Kitano. Péniblement brodé sur un scénario sans grande envergure (l'obsession basse de plafond d'un ex-truand pour la vengeance et la loi du Talion), le film aurait eu besoin pour s'en sortir d'un acteur aux épaules assez larges pour le porter, sachant jouer des émotions et des quiproquos de différences de cultures. Mais la largeur d'épaules n'est pas qu'affaire de centimètres, et si caster Hallyday était une bonne idée vu le profil psychologique recherché, cela s'avère une catastrophe, tant il tire le film vers le bas au lieu de le porter.
Film d'action, "Vengeance" réussit le tour de force de faire bailler dès la première demi-heure passée. En compétition officielle à Cannes, il n'a à l'évidence pas fait débat. On aurait même entendu quelques rires parait-il... les gens sont méchants.