Chroniques Concerts

The Good, the Bad and the Queen - La Plaine St Denis 15 Décembre 2006

Posté par : Emmanuel Durocher le 26/12/2006

Pour assister à ce concert privé et filmé pour Canal , il fallait soit faire partie des VIP soit avoir du bol et gagner sa place sur le web (ma catégorie) ; cela réclamait aussi de ne pas avoir la flemme, de traverser la Porte de la Chapelle et de s'aventurer à pied dans la jungle des studios de la Plaine St Denis et d'affronter le froid, car quand on gagne le droit d'assister au spectacle, on attend comme un gentil mouton et on se tait.

Organisation un peu foireuse, près de deux heures d'attente (tournage des Guignols en direct pour patienter) avec plus de public que prévu et chauffeur de salle pour apprendre aux gens comment applaudir et crier lors d'un concert (une nouvelle notion : le concert synthétique). On peut apercevoir Stéphane Saunier (programmateur) et Don Kent (réalisateur) dans le staff technique. Puis enfin, le "super-groupe" arrive dans un décorum entre saloon et Amérique de la prohibition, avec comme chefs de file un Damon Albarn en haut-de-forme et un Paul Simonon, légendaire bassiste des Clash et futur ex-peintre, en borsalino. Ils sont suivis du batteur Tony Allen, pionnier de l'afro-beat - longues années derrière Fela et Africa 70 - et du guitariste de Gorillaz (et ex-The Verve) Simon Tong. Un musicien aux synthés les accompagne, est-ce Danger Mouse ? Le guitariste et le batteur donnent plutôt l'impression de s'emmerder alors que le courant passe bien entre chanteur, clavier et bassiste, ce dernier tient son instrument comme une mitraillette et se tortille dans tous les sens.


The Good, the Bad and the Queen a encore peu de concert à son actif, ça sent un peu l'essuyage de plâtre et certains titres ont été repris deux fois quand Damon, despote inspiré, était insatisfait du résultat, il s'est même pris le bec avec l'ingénieur du son, mais on a pu écouter les douze morceaux prévus sur l'album à venir, parmi lesquels on retiendra particulièrement les excellents "Kingdom of doom", "Herculean" ou "The good, the bad and the queen". On sent dans ces compositions l'omniprésence d'Albarn, musicien doué et stakhanoviste, on est très proche de l'univers des derniers albums de Blur sur lequel s'ajoutent les particularités de chacun, la production originale de Danger Mouse, la rythmique envoûtante d'Allen et la basse chaloupée de Simonon. Vers la fin du concert, Damon joue au piano, à peine perceptible, un "happy birthday"pour l'anniversaire de Paul (il a cinquante et un ans), et on ne peut s'empêcher à ce moment d'avoir une pensée pour Joe Strummer disparu à 50 ans, au Noël de 2002…


Sonic Youth + Dinosaur Jr - Paris Le Zénith 13 Décembre 2006

Posté par : Emmanuel Durocher le 21/12/2006

Soirée sonique et sonore mais pas sonotone dans un Zénith bondé pour le retour de deux grandes légendes de la scène noisy.

Très rapidement, Dinosaur Jr monte sur scène, Jay Mascis arbore une chevelure blanche d'une longueur assez impressionnante comme si Saroumane avait troqué sa magie noire contre une guitare électrique, Lou Barlow affiche une allure d'éternel adolescent et Murph au crâne d'Âœuf étincelant demeure un batteur véloce et buté. C'est parti pour une (trop courte) demie heure d'un set intense qui privilégie surtout les morceaux de "You're living all over me" avec notamment "Freak scene" sur lequel Lee Ranaldo est venu pointer le bout de son nez. Lou est plutôt statique alors que Jay s'amuse à jouer une sorte de Kama Sutra avec sa guitare en lui faisant adopter toutes les positions possibles et Murph frappe comme s'il voulait faire mal à sa batterie (mais elle a l'air d'aimer ça en fait) ; ils déversent une avalanche de décibels et on se demande comment c'est possible de faire autant de bruit à trois, mais ce bruit, aussi crasseux soit-il, reste intense et mélodique.

Puis les quatre New-Yorkais de Sonic Youth débarquent accompagnés de Mark Ibold, ancien bassiste de Pavement (mention spéciale à Kim Gordon et sa robe courte incandescente aux reflets métalliques qui semble directement sortie d'un vieil épisode de Star Trek ou Cosmos 1999). Le son, très bon pour une fois au Zénith ça ne fait pas de mal, permet de saisir toutes les nuances et subtilités de la musique du groupe et les jeux de lumière sont très beaux, tout en sobriété, un peu à l'image du groupe. La set-list fait la part belle aux morceaux du dernier album, l'impeccable "Rather ripped" ("Reena", "Incinerate", "Lights out"Â…) et quelques anciennes gloires comme "Teenage riot", "100%" ou "Candle". Kim Gordon, Thurston Moore et Lee Ranaldo se partagent le chant et donnent un concert sans concession parfois avec une énergie débordante et même avec les années qui passent, ils n'ont pas usurpé leur nom. Seul regret, le live est un peu court (une heure et demie avec les deux rappels), une frustration qui s'explique sûrement par tous ces titres comme "Sugar Kane", "Dirty boots" ou "Youth against fascism" qui n'ont pas été joué ; il est vrai qu'on pourrait être en droit d'attendre trois heures de prestation de la part d'un groupe à la discographie quasi exemplaire.


Jad Wio à Paris La Flèche d'Or 04 Décembre 2006

Posté par : Emmanuel Durocher le 11/12/2006

Le "Flèche d'or tour"… trois soirs pendant lesquels le groupe de Denis Bortek et Christophe K-Bye reprend ses anciens albums et offre quelques nouvelles compositions. Ce premier volet concernait "Cellar dreams" (1986) compilation des premiers EP et "Contact" (1989) OVNI mêlant glam pop classieuse, rock stonien et textes sadiens. Sur la petite scène de la salle parisienne, seuls les deux fondateurs sont présents accompagnés d'un ordinateur qui se charge du reste. K-Bye, torse poil sous sa veste ouverte affiche toujours un sourire facétieux qui ne semble jamais le quitter tandis que Bortek, vêtu d'un body et de collants en latex dignes d'un donjon SM, possède un air énigmatique et même si son visage est quelque peu marqué par les années (et les excès ?), sa voix reste profonde et pénétrante.

L'énergie et la complicité partagées par les deux acolytes est communicative et le groupe enchaîne pendant près d'une heure et demie les titres aux sonorités cold wave de "Cellar dreams" et les morceaux érotiques et charnels de "Contact" ; on retiendra évidemment "Prescillia", "L'amour à la hâte", "36 15 Mad sex", qui vieillissent très bien en live et restent un bel exemple d'osmose entre textes et musique, ou encore le reprise batcave du "Paint it black" des Stones.

En rappel, deux nouvelles chansons : "Avalanche" et "Tu déconnes" une sorte de private joke sur l'esprit déconneur de K-Bye (moyennement convaincante, ça sonne un peu comme Anaïs) mais bien sûr l'inévitable "Ophélie" repris en cœur par le public qui ne boude pas son plaisir, un moment de grâce pervers en quelque sorte…

NB : Le "flèche d'or tour" continue, le lundi 11 décembre pour "Fleur de métal" et le lundi 18 décembre pour "Nu clé air pop" ; les concerts sont gratuits !