Brian Davison's Every Which Way

Brian Davison

par Francois Branchon le 15/03/2020

Note: 10.0     
spiraleAcheter


Le groupe anglais The Nice était une tête d'affiche rock de la fin des sixties, emmené par le mégalomane Keith Emerson, premier en 1967 (avec Mark Stein de Vanilla Fudge aux Usa) à imposer dans la pop l'orgue Hammond B3 comme instrument frontal, afin de donner toute la grandiloquence possible à la musique progressive naissante, présence sonore, et visuelle - Emerson massacrait son orgue à coup de pieds et de poignards à chaque concert. Souhaitant des pointures et non des gueux à ses côtés, il sabordera Nice après deux albums, "The thoughts of Emerlist Davjack" (1967) et "Ars longa vita brevis" (1968) pour fonder avec Greg Lake (King Crimson) et Carl Palmer (Atomic Rooster) Emerson, Lake & Palmer et produire la musique prétentieuse que l'on sait.

Brian Davison, le "Dav" de Davjack, était le batteur de The Nice, mais sinon s'assoir derrière ses fûts, il n'avait rien à proposer (ne composait pas, ne chantait pas) mais décida tout de même de fonder son groupe, Every Which Way. Il recruta Graham Bell, le chanteur des excellents Skip Bifferty (chroniqués ici) et trois inconnus venus de nulle part : le flutiste et saxophoniste Geoff Peach, le guitariste John Hedley et le bassiste Alan Cartwright.

L'album publié en 1970, qui bénéficie de l'attention bienveillante de John Peel, affiche la couleur et la senteur : ce sera de la musique, juste de la musique, du blues, teinté de jazz par les cuivres, une musique qui prend son temps, qui installe des climats, parfois enivrants. "Bed ain't what it used to be" frappe un très grand coup en ouverture : presque dix minutes de ballade blues méditative, flottante, en apesanteur (on n'est vraiment pas loin des Aynsley Dunbar Retaliation, le Fleetwood Mac de Peter Green ou des Beefeaters danois), une beauté juste magistrale qui justifie à elle seule l'étiquette de "Trésor caché".

Les autres morceaux sont du même tonneau, les vocaux de Graham Bell évoquent la bienveillance bucolique du Traffic des débuts (superbes "Placidly" et "All in time"). Les cuivres de Geoffrey Peach, parfois un peu crimsonniens évoquent aussi, notamment au long des huit minutes de "All in time", ceux de David Jackson (Van Der Graf Generator grande période "Pawn hearts"). Seul le dernier titre, "The light", qui laisse le champ libre au guitariste John Hedley peut lasser au bout de ses sept minutes de solo quasi continu... Mais ce (mini) bémol n'altère en rien la beauté de cet album, unique trace discographique d'un groupe d'orfèvres éphémère.

Davison rejoindra son ancien compère bassiste de The Nice Lee Jackson pour former Refugee, Graham Bell retournera chez Skip Bifferty devenu The Arc et le bassiste Alan Cartwright intègrera Procol Harum (à partir de l'album "Grand Hotel" de 73).





BRIAN DAVISON'S EVERY WHICH WAY Bed ain't what it used to be (Audio seul 1970)


BRIAN DAVISON'S EVERY WHICH WAY All in time (Audio seul 1970)