Crowing ignites

Bruce Cockburn

par Jérôme Florio le 01/12/2019

Note: 7.5    

Avec plus de quarante ans de carrière et ce trente-quatrième disque, Bruce Cockburn connaît une longévité comparable à celle de son compatriote Neil Young. Songwriter et guitariste très connu chez lui au Canada, bon chanteur, il évolue cependant dans des champs plus définis et traditionnels. Cependant "Crowing ignites" est uniquement instrumental et présente un caractère expérimental, digressif, qui le rend sans âge.

La plupart des compositions sont nées de la volonté de Bruce de laisser courir les doigts sur le manche des guitares (acoustiques pour la plupart), en sortant des techniques éprouvées pour se laisser happer par des sonorités inhabituelles. Bien que n’étant pas familier de la discographie de Cockburn, on arrive à déceler les constantes d’un style abouti, fait de jeu en finger picking (utilisation récurrente du "double stop", deux notes d’un même accord jouées simultanément), accordages ouverts et autres accords inversés ("Bardo rush", "Easter", "Seven daggers"). Un nombre somme toute limité d’éléments que Cockburn recompose à l’envi dans des genres folk, blues ou jazz, sans toutefois éviter quelques banalités qui restent jolies ("Sweetness and light", "Blind Willie" où il est secondé par un dobro). "April in Memphis", délicate balade arpégée, en est un brillant exemple. "Mt. Lefroy waltz" montre la part importante qu'occupe le jazz dans sa musique, elle est construite à l’ancienne sur un thème que la trompette et la guitare électrique reprennent et délaissent sur le mode de la conversation.
Deux titres sortent vraiment de l’ordinaire et créent l’étrange sono mondiale d’un monde qui n’existe pas : "Seven daggers" unit cloches et arpèges de charango dans une ambiance contemplative ; 'Bells of Gethsemane" des cloches tibétaines et le son grave d’une guitare baryton (fretless ?).

Entre classicisme réel et folklore fantasmé, Bruce Cockburn assume un rôle d’architecte exigeant, en ne perdant jamais de vue le souci de construire des mélodies toujours claires et lisibles.




BRUCE COCKBURN April in Memphis