Trio live

Jean-Philippe Muvien

par Sophie Chambon le 22/02/2007

Note: 9.0    

"Commencer par quelque chose qui finit", Jean-Philippe Muvien aime ça. C'est ainsi que débute ce "Trio live", sur l'apaisement d'une improvisation de près d'un quart d'heure, pendant un concert enregistré au Triton, salle des Lilas. Jean Philippe Muvien sort son quatrième album, le deuxième sur son propre label Allgorythm, capté en novembre 2005.

L‘aventure continue donc pour le jeune guitariste qui s'est recréé une famille, du grand ordonnateur, Daniel Humair, rencontré au CNSM en 1999, au maître Jean-Paul Celéa, contrebassiste proche du batteur, jusqu'au concepteur de la pochette Philippe Ghielmetti, dont on reconnaît le graphisme. Jean Philippe Muvien depuis son inaugural "Vive les jongleurs" (un des titres fétiche qu'il joue régulièrement) continue à travailler sur les textures sonores. Il avoue en souriant que le son est aussi important que le phrasé, que le travail commence avec le retour par l'ampli, véritable mise en abyme sonore. Inspiré - comment pourrait il en être autrement ! - par les distorsions, buzz et autres fuzz qui rendirent la guitare électrique maîtresse des seventies, il parvient à nous faire entrer dès la première écoute dans son univers, aux réminiscences aimées.

Sans piano, ce trio au son unique, illustre le niveau de maîtrise auquel sont parvenus ces musiciens. L'espace ne manque pas dans cette musique à la fois construite et ouverte. On aime toujours les irisations de la guitare de Jean Philippe Muvien, sa vivacité cinglante, le jeu des harmonies décalées. Sept compositions particulièrement enlevées, souvent co-écrites par le guitariste et le batteur, tiennent sur une longueur idéale de 46 minutes. Comme dans le précédent album, "Air libre", enregistré à la même période, Jean Philippe Muvien parvient à donner consistance à son projet de concilier l'invention de l'instant et le respect des règles du rebondissement comme dans "Complètement, complètement". Un travail de funambule plus encore que de jongleur, mais le spectacle est présent.

Avec cet humour un peu potache qui transparaît dès les titres - "Couscous purée", "Lou et le pote âgé" - on sent bien que le trio s'amuse mais avec une légèreté sérieuse : une musique qui respire, électrisante, impatiente, mais aussi tendre et lancinante ("Autre motif").
On écrivait pour "Air libre" que le guitariste avait trouvé en Daniel Humair un partenaire idéal. On persiste à le dire avec ce nouvel album : si ces deux là font la paire, Jean Paul Celea tire son épingle du jeu, troisième homme d'un trio un peu fou. Les entendre jouer de concert est un régal, ils ont tous les trois l'art et la manière de nous entraîner dans un tourbillon vivant et ludique.