Are you passionnate?

Neil Young

par Francois Branchon le 26/08/2002

Note: 4.0    

"Let's roll", le morceau qui apparaît à mi-parcours de ce Neil Young cru 2002, est un condensé révélateur des carences qui résonnent à travers tout cet album. Bâti sur une rythmique tellement balourde qu'elle en devient informe, Neil Young déverse une saccharine semée de clichés ("We're going after Satan, on the wings of a dove") censée rendre hommage aux victimes du 11 septembre, plus précisément celles du vol 93 que ses passagers ont fait se crasher en Pennsylvanie. Utilisant à la fois la sonnerie d'un portable et les paroles que prononça Todd Beamer ce jour-là ("Let's roll"), l'hommage de Young est non seulement inapproprié mais limite agressif, le bonhomme semblant renouer avec ses pires égarements politiques, notamment son ardent soutien à Reagan dans les années quatre-vingt (renié par la suite).

"Let's roll" fait craindre le pire de Neil Young, et hélas, le reste de l'album confirme. Bien sûr, l'accompagnement de Booker T. et d'une partie des MG's (Steve Cropper n'est pas là, remplacé par Frank Sampedro) est souvent agréable et plein de bonnes intentions sur les quelques morceaux lents (le doux et chuintant orgue Hammond de "You're my girl" ou "When i hold you in my arms") mais on attend autre chose d'un type de sa trempe que ces bonnes intentions. Son falsetto, sa marque de fabrique 70's ("Everybody knows this is nowhere", "After the goldrush"...) semble ici si forcé qu'il frise l'auto-parodie. Le rock agressif et vital d'albums récents ("Mirror ball", "Ragged glory") disparaît sous des rythmiques pesantes et une guitare grossière ("Differently", "Quit", "Are you passionate?", "Be with you", "She's a healer"). Même Crazy Horse, convoqué pour le titre "Goin' home" semble impuissant. Et au terme des onze morceaux (et après plusieurs écoutes pour s'en convaincre) "Are you passionnate?" prête facilement à la dérision. Are you interested ? Are you te foutre de notre gueule Neil...?