All tomorrow's parties Live

Nico

par Jérôme Florio le 24/09/2007

Note: 7.0    

En 1983, Nico n'avait plus grand-chose en commun avec la blonde et sculpturale walkyrie de l'époque Velvet Underground (1966) et de son premier disque folk et délicat, "Chelsea girl" (1967). Ceux qui ont le cœur bien accroché peuvent se procurer le DVD : Nico, les traits tirés, cheveux gras et pupilles dilatées, y est particulièrement flippante.

Nico a vécu sa vie selon ses propres règles, en dehors de toutes convenances sociales. Elle a refusé son statut de femme-objet, jusqu'à consciemment saccager sa beauté par des excès en tous genres. Epaulée par John Cale dès "The marble index" (1968), elle a tracé une voie musicale unique, aux confins de la musique médiévale, contemporaine et du rock. Elle dévoile sa vraie nature, une voix dure, à la fois sombre et maternelle : un chemin solitaire, qu'il est impossible d'ériger en quelconque exemple, et d'une cohérence presque terrifiante.

Au début des années 80, après six années de silence discographique (depuis "The end" en 1974), elle enregistre à Paris "Drama of exile" : un naufrage. Un disque glacial aux sonorités funk-rock synthétiques, avec une section rythmique moyen-orientale… Nico, comme absente, flotte sur le disque sans y être et laisse voguer le navire. "Drama of exile", c'est le son peu glamour de l'héroïne, froid et insensible. "All tomorrow's parties" présente deux concerts enregistrés en 1983, captés avec une qualité de son très passable. Le manager de Nico lui colle un drôle de backing-band, The Blue Orchids, un groupe post-punk de Manchester : s'ensuivent des tournées rendues extrêmes par le comportement addict de la chanteuse, astre noir autour duquel gravitent ses musiciens (le clavier James Young, qui l'accompagnera six ans durant, n'en est pas sorti indemne).

Pour le premier Cd, "Incognito", on est dans le flou : on ne sait ni où il a été enregistré, ni qui joue avec Nico (à l'exception de James Young). Le deuxième provient du Library Theater de Manchester, ce sont les Blue Orchids qui l'accompagnent sur les titres récents ("Saeta", "60/40", "Vegas", "Genghis Khan", "Purple lips"). Avec eux, la musique de Nico est rigide et tribale, tranchante comme un rasoir. Ce n'est certainement pas innocent : elle peut ainsi gagner le staut de mère putative des Siouxsie et autres rejetons du mouvement gothique et cold-wave. Mais sa personnalité explose les carcans. Echappe au carnage le moment du show où Nico joue seule à l'harmonium ses titres les plus anciens ("Janitor of lunacy", "Tananore", "Afraid", No one is there", "Frozen warnings"), pour un parterre de crêtes et de corbeaux.

Ces enregistrements ont valeur de document et sont avant tout réservés aux amateurs. Les autres, qui veulent découvrir, s'orienteront de préférence vers "Desertshore", "The marble index" ou "Chelsea girl". "All tomorrow's parties" montre un personnage insondable, loin d'être en paix à quarante ans passés, qui nous parle depuis le pays de l'autodestruction et de la déchéance. Nico est allée dans des endroits où personne ne pouvait la suivre.


NICO All tomorrows parties (Live 1982)