Take it from the man

The Brian Jonestown Massacre

par Chtif le 15/09/2005

Note: 7.0    
Morceaux qui Tuent
(David Bowie I love you) Since I was six
Oh Lord


En 1996, le Brian Jonestown Massacre du prolifique Anton Newcombe a pondu rien moins que trois albums. Logique, au fond, pour un fan des sixties qui a vu ses groupes fétiches s'étriper chaque mois à coup de 45 tours dévastateurs... Aujourd'hui, ce serait plutôt un single tous les deux ans, bien amorti.

La cuvée de mai 1996, "Take it from the man", démarre bien en bouche, avec la mélodie capiteuse de "Vaccum boots", aux délicieux arômes garage 60's. On est très loin de l'ankylosante robe psychédélique de "Methodrone", paru seulement un an plus tôt. Ici, des touches des Animals viennent corser un bouquet toujours dominé par les Stones (cet harmonica sur le morceau éponyme, ces crissements de médiator sur les cordes...).

Le résultat ne se fait pas attendre : les verres se vident, les yeux s'humectent et les cerveaux partent en vrille. Impossible de contenir son excitation sur l'accélération finale de "Oh Lord", sur ces notes égrenées, frottées, glissées, et cette batterie qui s'affole jusqu'à l'implosion. Les cowbells compulsives de "Monkey puzzle" ont également de quoi rendre marteau, soutenues par un chant rugueux comme Joe Cocker ou Chris Bailey en ont le douloureux secret.

Comme d'habitude dans ce genre de réunion, l'un des convives patauge dans l'alcool triste. C'est "(David Bowie I love you) Since I was six", qui déverse des flots d'accordéon nostalgique pour un hommage au rêveur de "Space oddity".

L'influence de Newcombe sur les groupes de la dernière décennie devient palpable au fur et à mesure que les morceaux défilent : la commémoration festive de "Caress" ferait aujourd'hui le bonheur des Bees, et les chœurs glorieusement psychédéliques de "Who ?" ont dû inspirer plus d'un Dandy Warhol... Le final de "Cabin fever" dessine même les prémices d'un émo-rock (hérésie !) larmoyant : guitares pluvieuses, voix qui tremblote sur l'air connu de "i don't wanna die"...

Seulement Newcombe, en érudit mélomane qu'il est, aurait dû se rappeler que les meilleurs albums sont aussi les plus courts. (au hasard... "Revolver" 34 minutes. "Ziggy Stardust" 38 ou encore "Reign in blood" : 28 !). Newcombe croit ici pouvoir tenir la gageure sur près de 70 minutes, mais ne fait qu'éventer son breuvage sur les ultimes morceaux. Personne n'avait ainsi besoin d'une deuxième version-fleuve de "Straight up and down" s'étalant sur 11 minutes (citations de "Sympathy for the devil" et "Hey Jude" à l'appui) pour clôturer l'album. On se délectera donc de ce "Take it from the man" en évitant soigneusement les dépôts qui gâchent le fond de bouteille.