Volume 2

The West Coast Pop Art Experimental Band

par Francois Branchon le 14/08/2001

Note: 9.0    
Morceaux qui Tuent
Smell of incense
Suppose they give a war and no one comes
Unfree child


Enregistré et publié en 1967, "Volume two" est un projet plus ambitieux que son prédécesseur. D'entrée, sa pochette ne passe pas inaperçue, avec une photo centrale au fish-eye montrant Bob Markley et les frères Harris torse nu vautrés sur le sol d'une salle de bains totalement argentée (clin d'oeil à la Factory new-yorkaise de Warhol aux murs couverts de papier alu ? Non, plus prosaïquement, une photo prise dans l'appart d'un branché d'Hollywood, pote de Markley et fasciné par le film "Goldfinger"). Au verso, les photos des trois musiciens fondateurs, celle de Bob Markley naturellement plus grande que les deux autres. L'album s'ouvre magnifiquement avec "In the arena", satire politique dominée par les stridences de la guitare électrique de Ron Morgan, la voix-mégaphone de Markley et les harmonies en cascades, quasi religieuses de Shaun et Danny Harris. Le morceau, étonnant, n'est rien comparé à ce qui suit, "Suppose they give a war and no one comes", une mise en musique d'un texte de 1936 de Franklin D. Roosevelt contre la guerre (non crédité), déclamé sur une trame basse-batterie-guitare très flamenco psychédélique (réminiscence du "Spare chaynge" de Jefferson Airplane), des bruits primitifs, une armée de percussions lointaine, une montée générale vers un orgasme, ponctué au final par les pleurs d'un bébé. Magnifique. "Buddha" qui le suit est anecdotique (une lubie de Bob Markley) mais son suivant "Smell of incense" est le meilleur morceau de l'album. Un rythme de ballade folk-rock, des entrelacs de guitare électrique, toute en arpèges délicats, et de basse, ronde et douce et les frappes de Hal Blaine et Jim Gordon, extraordinairement fluides et légères. Quelques accords légèrement distordus bien plaqués par moments, des vocaux aériens et un solo de Ron Morgan fin et sinueux complètent ce qui reste à jamais comme le chef d'oeuvre du West Coast Pop Art Experimental Band. On à peine à le croire quand tout ce beau monde, à l'ouvrage en 1967 de surcroît, affirme n'avoir jamais touché le moindre pétard ni gobé le moindre buvard ! "Overture" romp le charme hébété par un larsen digne du Kaukonen des grands jours accouchant d'une paisible ballade champêtre. La suite de l'album (la face B du vinyle originel) est plus diverse, avec des titres 'rock' plus conventionnels mais terrains de jeu de rêve pour le guitariste Ron Morgan décidément très inspiré par Jefferson Airplane ("Unfree child", "Carte blanche"...), "Delicate fawn", un titre country de Danny Harris où le tuba remplace la basse et la cornemuse la guitare, avec un final jazzy (et autobiographique de Markley) "Tracy had a hard day sunday", où les deux guitaristes (rythmique et soliste) réalisent encore des merveilles de finesse dans un style 'à priori' étranger. La réédition est complétée par les versions single de "Smell of incense" et "Unfree child" (single paru en France en 1968 !). "Volume Two" est un monument, à ranger tout contre les piliers de l'époque, disons entre "After bathing at Baxter's" de Jefferson Airplane et "Forever changes" de Love.