Meet Triste Janero

Triste Janero

par Francois Branchon le 31/12/2004

Note: 8.0     

Contrairement à ce que le nom suggère, Triste Janero n'est pas un groupe brésilien mais texan, de Houston, et dont aucun des cinq membres n'est d'ailleurs d'origine latine. Contrairement aussi à ce que leur musique propose, qui semble sortie tout droit d'une plage copacabanesque. La musique mainstream américaine des sixties avait tout un pan exotique, les instrumentaux de Herb Alpert, les standards de jazz chantés par Astrud Gilberto et surtout, comparaison qui vient immédiatement à l'esprit, Sergio Mendes et son groupe Brasil 66...

Les Triste Janero, signés en 1968 par le label White Whale, proposent une soft pop de cette lignée, sophistiquée et ensoleillée, un équilibre subtil entre latinité, guitares jazzy et mélodies pop, mélange que Mendes revendiquait. Un peu limités techniquement (le plus "vieux" a 23 ans), ils compensent par un raffinement de tous les instants, une délicatesse touchante, une chanteuse, Barbara Baines, à voix délicieuse et un musicien extérieur, bassiste et arrangeur, Norm Miller. Les morceaux s'enchaînent avec légèreté, parfois pures bossa novas à guitare acoustique en avant ("Without him", "Today it's you", "How insensitive"), parfois plus rythmés "à la Orfeu negro" ("Somba de Orphia"), voire instrumentaux expérimentaux (le "T.J. blues" final, qui annonçait presque les incursions du Carlos Santana de "Caravanserai"). Adeptes aussi des reprises, ils sont parfois proches de l'original - "You didn't have to be so nice" des Lovin' Spoonful -, glissent un filtre exotique - version bronzée, nonchalante et aérienne de la scie de l'époque de Dionne Warwick "Walk on by" - ou franchement décalés - le méconnaissable "Get together" de Chet Powers, qui regarde de très loin la création qu'en avait fait Jefferson Airplane en 1967.

"Meet Triste Janero" est ce ces albums oubliés qui ne peuvent compter que sur la passion d'un label de réédition digne de ce nom pour revoir le jour. Merci donc aux fouineurs londoniens de Rev-Ola, et souhaitons-lui aujourd'hui la carrière que les circonstances (label, promotion...) ne lui ont pas permise en 1969.