Auguri

Dominique A.

par Frédéric Joussemet le 17/11/2001

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
Pour la peau
En secret
Les hommes entre eux
Les terres brunes


Auguri est le quatrième album de Dominique A. Le précédent, "Remué", était une perle noire, un recueil de morceaux musicalement torturés et psychologiquement tourmentés dont la puissance rendait impatients de la suite ceux qui avaient accroché. Depuis le choc de "La fossette" - le premier album, référence absolue de la chanson minimaliste - chaque nouvelle parution du nantais étonne. La musique ne creuse pas vraiment son lit mais demeure mouvante, passant du minimalisme à une pop plus 'normale' ("La mémoire neuve") pour culminer dans l'exploration électroacoustique de "Remué". Elle garde sa simplicité, en s'étoffant de mises en ambiance superbes. Pourtant, spécialement dans "Auguri" produit pour la première fois par une tierce personne (John Parish, pote de ), cette musique ne semble qu'un prétexte. C'est le chanteur, l'auteur, que l'on vient rencontrer dans ses disques. Sans arrogance ni volonté de se différencier coûte que coûte, il livre tout simplement l'acier de son énergie et la violence de ses sentiments. Dominique A reste sûr de ce qu'il refuse - se laisser enfermer - et de ce qu'il veut - faire du rock pour s'exprimer. Au fil des albums, l'homme évolue, prend de l'assurance pour pousser pleinement sa voix lorsqu'il le faut. "La fossette" était un concentré d'inhibition, "Auguri", même modeste sur ce plan, ne dresse plus de barrière entre ses sentiments et lui-même. Et par magie, la fragilité demeure, comme on demeure vulnérable à une émotion qui tord le ventre ou à une beauté plus vive que d'habitude. Musicalement, ce nouveau disque sonne comme une assimilation du passé, presque un constat. Les chansons sont souvent élémentaires, volontairement simpliste, "Ses yeux brûlent", ou obsédante, "Nous reviendrons", mais gardent le bénéfice des sons expérimentaux de "Remué ". Plus étonnantes, les chansons rapides et pop qui parsèment l'album, "Antonia" (réminiscence du "Twenty-two bar", morceau maudit, 'cross-over' qui l'a révélé (malgré lui) aux media et au grand public), "Je t'ai toujours aimée", reprise des belges Polyphonic Size. Pourtant, amertume, refus de la soumission, temps qui passe et mélancolie sont toujours les fils qui tissent les climats, sans redondance ni exploitation, même après quatre disques. Et peu à peu, en l'explorant, on comprend "Auguri" : ce n'est pas un album ténébreux, il est baigné d'un clair-obscur, au départ imperceptible, illumine chaque instant. Par la même alchimie, le Pays de Galles de la photo de livret est nimbé d'une clarté espagnole, et les mots tristes s'auréolent d'espoir. C'est juste Dominique A qui fait don de sa liberté et de son exaltation pour le futur.