Malheureusement trop souvent oublié dans la discographie
de Sly & the Family Stone (au profit de ses deux prédécesseurs "Stand!" et "There's a riot goin' on"),
"Fresh"
est très certainement leur meilleur album, dernier sursaut
d'orgueil de Sly, magnifiquement immortalisé sur la pochette.
Dernier grand album d'un groupe en
voie de séparation - le batteur Gregg Errico parti en 1971, Larry Graham en 1972 - il a fallu
changer de fond en comble la rythmique, avec l'arrivée du batteur Andy
Newmark et du bassiste Rusty Allen. L'album connîtra un succès commercial,
certes moindre que les deux précédents, mais avec tout de même trois singles dans le Top 100 R&B, dont "If you want me to stay" qui pointera à la douzième place.
L'album
s'ouvre par le sublime "In time", dont la légende veut
qu'un Miles Davis subjugué ait convoqué son groupe à
une séance pour lui faire écouter en boucle ce titre pendant une
demi-heure ! "If you want me to stay"
le suit, avec la basse virevoltante de Rusty Allen, qui réussit l'exploit de
faire oublier son illustre prédécesseur, Larry Graham. Ce début d'album montre
le nouveau virage du groupe, à mi-chemin
entre l'énergie de "Stand!" ("If it were left up to me")
et la retenue de "There's a riot goin' on" ("Frisky"). On
retrouve également leur seule reprise sur un album original, "Que sera, que sera, (Whatever will be, will be)".
On connait aussi le goût de Sly pour revisiter ses anciens morceaux : ici, "Keep on dancin'" est une version réécrite
de "Dance to the music".
Sa
production léchée fait indéniablement de "Fresh" la plus grande
réussite du groupe, car si Sly Stone a, comme pour "Riot",
utilisé de nombreux "re-re", le son est mieux maîtrisé
et n'est cette fois ci pas marqué par un souffle quasi continu. Il
existerait ainsi une dizaine de versions de chaque chanson de "Fresh", si bien qu'Epic a sorti en 1991, sans s'en rendre compte, une
version de "Fresh" où seul le titre « In
time » correspondait à l'original.