The delivery man

Elvis Costello

par Vincent Théval le 13/12/2004

Note: 8.0    
Morceaux qui Tuent
Nothing clings like Ivy


Vendu à tort par quelques collègues pressés comme un nouvel épisode du retour au rock du King (on ne peut quand même pas nous faire le coup tous les deux ans), "The delivery man" est un disque âpre, d’un premier abord peu aimable. Mais comme souvent avec Costello, la persévérance est récompensée et l’on finit par goûter pleinement à la simplicité de ces chansons qui hésitent entre rythm’n blues, country et soul. Soit un retour à des racines profondément américaines, qui ont forcément à voir avec Johnny Cash.

"The delivery man" est tout entier tourné vers l’histoire d’un personnage réel qui tua son ami d’enfance pour n’avouer son crime que trente ans plus tard. Un personnage déjà utilisé par Elvis dans une chanson qu’il avait composée en 1986 pour… Johnny Cash, interprète idéal de cette histoire de culpabilité rongeante. Le fait divers est devenu fiction sous la plume du King, qui a inventé une vie et des amantes à ce personnage et leur a consacré ce disque. Que les moyennement anglophones se rassurent : les textes sont imprimés dans le livret. Que ceux dont l’anglais n’a pas survécu à de fastidieux cours au lycée se détendent : musicalement, les Imposters sont au top. Steve Nieve et son piano sont là, libres et élégants. Pete Thomas peaufine son jeu de batterie légèrement sourd, capable de puissance cassante comme de douceur, et Davey Faragher est loin d’être manchot avec sa basse ("Button my lip", "Monkey to man"). Mais la vraie grande et belle surprise, c’est la présence de Lucinda Williams sur la puissante et gouailleuse "Theres’s a story in your voice" et surtout d’Emmylou Harris sur trois chansons somptueuses ! "Nothing clings like Ivy" est appelée à devenir un classique absolu de Costello, ballade au déhanché discret à laquelle Emmylou apporte une touche country bouleversante. Sur "Heart shaped bruise", la pedal steel guitar est de sortie, qui accompagne avec classe les deux voix en totale harmonie. Enfin, l’album s’achève sur un nouveau tête-à-tête. Accompagnés d’un simple ukulélé égrainant quelques notes sibyllines, Elvis et Emmylou chantent de concert une comptine apaisante. À l’issue de ce doux moment, on fomente déjà les plans les plus machiavéliques pour faire capoter le mariage de Costello et de la fadasse Diana Krall.