Live chronicles

Hawkwind

par Alric Mabire le 28/08/2009

Note: 7.5    
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A partir de "Live 79", Hawkwind entre dans ses années 80. Délesté de la personnalité de Robert Calvert, jugé trop ambitieux, trop excentrique et trop instable, le groupe s'oriente vers un space rock fortement teinté de hard rock. Dave Brock rappelle vers le vaisseau mère le guitariste Huw Lloyd-Langton, qui, tout le long de la décennie à venir va faire figure de "guitar-hero". Il n'est pas un inconnu. Crédité (à 19 ans à peine) sur le premier album d'Hawkwind, Lloyd-Langton s'était éloigné de la formation pour faire cavalier seul (suite à un trip au LSD qui faillit lui coûter cher). Avec ce retour, Hawkwind n'aura de cesse (malgré une parenthèse électronique en 1982/83 avec "Church of Hawkwind et “Zones") de faire progresser ses compositions vers un hard Fm explicite, notamment avec l'album "Chronicle of the black sword" en 1985, dont "Live chronicles" transcrit la tournée.

L'album et la tournée étaient conceptuels, la musique accompagnant l'histoire d'Elric le Nécromancien, un des personnages les plus célèbres de l'écrivain de science fiction Michael Moorcock (un proche d'Hawkwind, ayant déjà prêté sa voix aux albums "Warrior on the edge of time" et "Sonic attack"). Moorcock s'embarque sur la tournée des faucons, ponctuant le concert de narrations, pour que les spectateur se situent dans l'histoire. Et pour couronner le tout, deux acteurs jouent sur scène les rôles les plus importants, Elric et Zarozinia.

Autant dire que ce 4 décembre 1985, à l'Odeon Hammersmith de Londres, la salle est pleine et l'ambiance cosmique et théâtrale. Par rapport à l'album studio, "Live chronicles" est une réussite. Les morceaux sont étoffés par un arrière-plan électronique que conduit à merveille Harvey Bainbridge, qui a laissé sa basse au nouveau venu Alan Davey, et les morceaux les plus "électroniques" sont sans doute les plus réussis : "The pulsating cavern", le duo claviers/basse fait des ravages, construisant une ambiance doucerette et envoûtante traduisant parfaitement l'extrait d'Elric auquel il se rapporte, "Choose your masques" délivre derrière ses nappes électroniques une dimension apocalyptique et chaotique (voix inquiétante de Dave Brock qui se fera Seigneur du Chaos pour quelques minutes) qui renvoie à des milliards d'années an arrière la version studio de 1982. On sera moins indulgent sur les morceaux typiquement hard rock : "Song of the swords", "Angels of death" et "Needle gun", efficaces sans être novateurs, ou les "classiques modernisés" - "Master of the universe", "Assault and battery" - intéressants, voire entraînants, mais éloignés de leur substance originale, surchargés de solos. Enfin, les deux compos de Lloyd-Langton, voix un peu nasillarde bien mariée au ton épique et nostalgique du rock ("Moonglum", toutefois typé Toto ou Journey), balade hypnotique ("Dreaming city") à voix effacée fonctionnant à merveille, le duo Bainbridge/Davey en arrière-plan, la guitare souple et discrète sur le devant.

Du fait de son imprégnation des années 1980, "Live chronicles" est un des albums d'Hawkwind qui a le moins bien vieilli. Son pendant studio avait l'avantage d'un son plus sec, qui lui aura permis de franchir les années avec moins de difficultés. L'auditeur actuel devra ainsi mettre de côté ses préjugés, faire abstraction de la manne sonore typée, pour l'apprécier pleinement. Ce concert fut précédemment publié en 1986 par GWR Records. Mais des problèmes avec Moorcock obligèrent de l'amputer de ses narrations et des morceaux qu'il avait co-signé. Ces six plages retrouvent aujourd'hui leur place (comme sur Griffin en 94), sur cette très soignée réédition Esoteric, complète donc, et remasterisée.