Premier groupe à émerger de la bouilloire rock de San Francisco,
Jefferson Airplane est en 1966 le groupe du chanteur Marty Balin, un
habitué des circuits folk de la Bay et propriétaire du Matrix, club
qu'il ouvre aux rockers (les Doors y joueront en 67 un concert mémorable
enregistré sur le bootleg "Moonlight drive" avec une pochette signée
Guy Pellaert). Difficile d'imaginer sous "Takes off" les futurs ailes du
psychédélisme débridé que l'Airplane déploiera. Le son est propre sinon
propret (enregistré sur 3 pistes !) et les musiciens ont le look de
sages étudiants américains, gentils et bien propres sur eux. Seules des
coupes de cheveux à la Byrds
témoignent de leur non-conformisme. Et si le rock du Sud (version
Presley) a déjà depuis longtemps installé ses codes, sexuels et
vestimentaires, San Francisco n'est visiblement pas encore sous
influence love-ins multicolores. Avec une circonstance atténuante, le
sorcier Ken Kesey termine tout juste la mise au point du LSD, une
question de jours...
Musicalement, derrière ce son étriqué, bien loin de ce qu'au même moment
les Byrds sont capables d'offrir d'envoûtement, les chansons sont
d'essence folk teinté de pop ou de léger blues, centrées sur les mélodies, aucune
digression instrumentale n'étant encore au programme. A l'exception de trois reprises - "Tobacco road" (John Loudermilk), "Chauffeur blues" (Lester Melrose) et "Let's get together" (Chet Powers) - les chansons, toutes signées de Marty Balin, sont bien
tournées ("Come up the years", "And i like it",
"Bringing me down") et l'une d'entre elles - "It's no secret" - deviendra un
classique du groupe.
Jorma Kaukonen
est effacé, coincé dans son petit complet en Tergal, Kantner
auto-proclamé co-leader est transparent, Signe Tole Anderson, la
première chanteuse (Grace Slick la remplacera dès l'album suivant) se
démène et seul Jack Casady impressionne, sa basse déjà très en avant
annonçant un individu d'un autre type...
JEFFERSON AIRPLANE It's no secret (Audio seul 1966)